Moments Précieux - Cour de l'Archevêché

Entre abbatiale romane et palais du XVIIe siècle, la Cour de l’Archevêché accueille des concerts avec des artistes rares ou en formation inédite. Avec ses 400 places assises, elle offre l'écrin idéal pour ces musiques intimistes, profanes ou sacrées.


lucibela (cap-VERT) / 60 min

- PREMIÈRE TOURNÉE EUROPÉENNE - 

 

 

Mardi 10 juillet à 19h30   

Lucibela porte son beau nom ! Nouvelle voix du Cap-Vert, son timbre solaire illumine avec autant d'intensité les chants traditionnels de son île (Mornas et Coladeiras) autant que des compositions actuelles. Prolongeant le travail de reconnaissance des musiques du "petit pays" rendu célèbre par Cesària Evora, cette jeune et belle chanteuse incarne avec une profondeur charnelle, la toute nouvelle génération. Accompagnée par Aldair Lima da costa Neves et Ivan Adriano Spencer Brito Gomez (guitare), Stephan George Lopez Almeida (cavaquinho) et Pericles Ascençao Paris (percussions), elle souffle sur la saudade un air plein de grâce et de fraîcheur. 


Lucibela. "La jeune Capverdienne est née en 1986 à São Nicolau, l’une des îles du Barlavento, les îles « aux vents » du nord de l’archipel sahélien. Elle publie son premier album, Laço umbilical, le lien premier qui relie la créature à sa terre. En treize titres, Lucibela-la-voix d’or, fait le tour de la question : être une femme, être Cap-Verdienne, vivre loin, aimer charnellement et avec grâce. Le miracle Lucibela tient dans sa capacité à explorer les graves à la façon des grandes sambistas brésiliennes et à y ajouter un vibrato en forme de frisson.

Puisées dans la tradition, composées par de grands anciens comme Manuel de Novas ou par la génération suivante (Jorge Humberto, Betu…), les chansons défendues par Lucibela traversent les décades. Lucibela, comme Elida Almeida qui signe ici deux titres, appartient à une nouvelle génération décomplexée. Ces jeunes femmes s’emparent des guitares, du cavaquinho, du saxophone, de l’accordéon, du violon, de tout le capharnaüm des îles pour le passer au shaker de la civilisation des tablettes et de la télévision. Lucibela dégage une intensité intrigante, tirant des bords entre le sentiment pur, l’audace du jeu, et l’opposition volontaire. Les arrangements, la direction musicale de Laço Umbilical ont été confiés à l’équilibriste délicat Toy Vieira, complice de Cesaria Evora, entendu aussi auprès de Lura.

Lucibela a grandi à São Vicente, dont le port, Mindelo, est célèbre à plus d’un titre. La ville hébergea l’un des premiers lycées des colonies portugaises, où étudia Amilcar Cabral, le père de l’indépendance en 1975. Veuve et pensionnée d’État, la mère de Lucibela, soucieuse de la scolarité de ses enfants, déménage à Mindelo et inscrit ses enfants au lycée.

Lucibela adore chanter, et Mindelo est aussi un paradis musical depuis que les marins brésiliens, cubains, anglais, portugais y ont semé les graines de la morna et de la coladera, genres créoles et métissés, divulgués à travers le monde par l’une de ses illustres interprètes, Cesaria Evora, native de Mindelo.

Sous des airs de douceur riante, Lucibela a appris les rigueurs de la vie. Sans doute, cette implication obligatoire du destin dans l’art a-t-elle donné à la jeune fille la faculté extrêmement féminine de l’intuition. Quand sa mère décède, privant la famille de toute ressource, Lucibela est en terminale. Pour poursuivre les rêves maternels, elle doit trouver une activité lucrative. L’adolescente a un don, la voix. Elle adore la bossa nova, bien sûr, mais elle écoute aussi de la pop brésilienne à la radio. Elle fonde un groupe avec des copains qui comme elle préfèrent le jazz, le rock, aux genres traditionnels.

Lucibela comprend avec intelligence que chanter dans les hôtels et les bars de Mindelo, où les clients, des touristes, réclament des chansons du cru, lui fournira de quoi vivre. Elle s’attaque donc au répertoire de Cesaria Evora, en commençant par Nutridinha, coladera joyeusement troussée à propos des jeunes filles dissipées.

Elle intègre le groupe Mindel Som, puis part pour l’île de Sal, où elle réinvente la profession de chanteuse d’hôtel, notamment au Morabeza. On lui offre un contrat sur l’île aux dunes de sable, Boa Vista. Elle apprend, dit-elle, elle travaille, beaucoup. La technique vocale, le répertoire, et les secrets de la séduction en scène. Partie vivre à Praia, la capitale, en 2012, elle y rencontre Kaku Alves, qui fut le guitariste de Cesaria Evora pendant près de 15 ans. Elle chante au Quintal da Musica, participe aux concours télévisés Talento Estrela et Estrela Pop, arrive en finale.

Pour se rapprocher de sa famille et de sa fille, elle vient de déménager à Lisbonne. Pour apprendre encore, ne pas perdre la main, et parce que chanter est un partage, un tête à tête sans fard, Lucibela explique qu’elle continue à chanter sur les places, dans la rue. Et lorsqu’elle le dit, elle s’éclaire avec douceur d’un sourire de plaisir."

Véronique Mortaigne

© N'Krumah Lawson-Daku / Lusafrica